Pierre Sojo


Hormis l'énergie manifeste, le plaisir de la peinture, ce goût pour des scènes où se tissent l'espace intérieur d'une habitation, la figure humaine, le paysage et la nature morte, cet entremêlement des genres pour un récit qui se déploie avec bonheur dans la toile ; au delà de ces enjeux, mené par l'art pictural depuis son apparition, d'unir la forme et la couleur ou de traduire le volume en surfaces planes ; au-delà de l'aventure intérieure qui définit l'artiste : qu'est ce qui particularise ce travail ? Comment en nommer l'originalité ? Il faut d'abord se disposer à ressentir ce qui donne un caractère unique au corpus d'œuvres déjà conséquent réalisé par ce jeune artiste. 

Concernant la question de l'immobilité, de la fixité inhérentes à cet art visuel, avec la peinture de Pierre Sojo il ne s'agit pas d'un arrêt sur image, d'un mouvement interrompu car la scène représentée est naturellement stable et n'appelle à aucun déplacement, ne souhaite aucun changement. Tout est immobile mais semble animé d'une sorte de respiration. Il y a comme un battement intérieur dans une atmosphère silencieuse, comme une attente qui se répète, un rythme imperceptible qui réveille incessamment la lumière, les objets, les corps et les visages. Il y a une vie silencieuse qui tient à la fois de la présence invisible de l'artiste et d'une présence plus vaste, une réalité que la surface de la toile ne délimite pas mais recueille et avec laquelle l'artiste cherche à se confondre. Il s'agit de deux présences aux deux bouts de l'œuvre, aux extrémités de sa réalisation, qui en viennent à s'unir. Ce sont leur juxtaposition, leur complicité qui nous surprennent avant de nous émouvoir.

Texte de Jean Anguera